samedi 21 décembre 2013

La vie à Kibumba, ancien village sous contrôle du M23

Depuis que l'armée congolaise a chassé les combattants du M23 de ses dernières positions le 5 novembre dernier, les populations réfugiées se réjouissent de pouvoir retourner chez elles. La blogueuse Chantal Faida est allée observer l'ambiance d'après-guerre à Kibumba, un village anciennement occupé par le M23.


Par Chantal Faida, Goma
Situé à une dizaine de kilomètres au nord de Goma, le village de Kibumba, en territoire de Nyiragongo, est entouré de merveilleux paysages et de collines verdoyantes, dont certaines bordent la frontière entre le Rwanda et la RDC. 
Mais au milieu de l’année 2012, la rébellion du M23 a pris le contrôle total de cet espace. Et les combats entre l’armée loyaliste et la rébellion du M23 ont coûté la vie à de nombreuses personnes et provoqué la fuite de dizaines de milliers d’habitants, la séparation de familles et la dévastation des biens des paysans. Bref, un véritable chaos.
"Nous dormons sans fermer nos portes"
"Enfin, nous retrouvons notre liberté", se réjouit Dieudonné Rurakabje, agent de cadastre au territoire de Nyiragongo. "Ici, au quotidien, à l’époque du M23, nous étions soumis à des travaux forcés, forcés de payer des taxes et de faire des patrouilles nocturnes. Nous avons déploré de nombreux cas d’assassinats. Mais avec le retour des forces loyalistes, aujourd’hui Kibumba est un havre de paix. Nous dormons sans fermer nos portes", ajoute-t-il.
Ces propos sont nuancés par Bagabo Hangi, qui déplore les arrestations et les menaces auxquelles font face les civils qui ont collaboré avec les rebelles du M23. "Que l’État relâche ceux qui ont été forcés de collaborer avec les rebelles, car ils l’ont fait pour sauver leur vie. La priorité serait plutôt de récupérer les armes et de ramasser les engins non-explosés laissés çà et là dans la forêt pour assurer la protection totale de la population, au lieu de faire la chasse aux sorcières", avance-t-il. 
Après la guerre, l’État doit lutter contre la pauvreté
De Goma à Kibumba, des drapeaux des partis politiques — tant de la majorité que ceux de l’opposition — ont été fixés à des arbres, environ tous les dix mètres. Les autorités administratives sont de nouveau en place, sauf le chef de groupement de Kibumba dont l’installation traine en raison de conflits coutumiers.
En général, les habitants de Kibumba saluent l’implication des autorités tant nationales qu’internationales pour le retour de la paix. Mais ils émettent le vœu de voir leurs problèmes, dont certains sont endémiques, enfin résolus. Notamment : la reconstruction des maisons détruites, l’accès aux semences pour les champs dévastés, l'installation de systèmes d’adduction d’eau, et la sécurisation de la frontière entre le Rwanda et le Congo.
Car, à part les soins de santé gratuits garantis par l’ONG COOPI (Coopération Italienne) et la bonne collaboration entre civils et forces loyalistes, l’impression générale est que l’après-guerre ne sera pas bien différent de l’avant-guerre.  
Cet article a d'abord été publié sur RNW, le 12.12.2013